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LITTERATURE

L’Hôpital vu par les Écrivains

LITTÉRATURE – L’Hôpital vu par les Écrivains – Auteur Richard Bousiges

Livre publié aux Huchet d’or Éditions, 2015, un livre toujours d’actualité.

Amateur d’histoire et après avoir publié des ouvrages sur les Cévennes, Richard Bousiges, délivre le fruit de ses lectures sur l’hôpital. Citant Émile Zola, Alphonse Daudet, Victor Hugo, Honoré de Balzac, Dominique Bromberger, Claude Pinault, Jean-Christophe Rufin… l’auteur nous explique comment le patient vit à l’hôpital. Ces extraits racontent des lieux, décrivent l’attente, l’annonce de la maladie, la souffrance et la mort.

Richard Bousiges, ancien directeur général adjoint du centre hospitalier régional d’Orléans, puis directeur du centre hospitalier de Blois.

8 ans après la sortie de ce livre, qui reste toujours d’actualité, le Dr Denis Dauphin, vice-Président de l’APHO a interrogé l’auteur.

« Directeur d’hôpital, préoccupé par la prise en soin des malades et passionné de lecture, j’ai rassemblé des témoignages littéraires sur des hospitalisations. Prenant en compte aussi bien le point de vue des écrivains que celui de simples témoins, ce bref ouvrage paru en 2015 n’est plus vraiment à jour. Cependant il relate des expériences qui sont toujours d’actualité.

Pour donner un aperçu malgré tout assez complet, le livre, comme une pièce de théâtre classique, expose l’expérience de l’hospitalisation selon la règle de l’unité de lieu (le lit), de temps (l’hospitalisation) et d’action (les soins). Il en ressort que le plus important sont les relations entre le personnel, tant médical que paramédical, et le patient. La qualité de cette relation est essentielle : sa sincérité, son respect du patient, son degré de précision, son adaptation aux besoins de chacun, son humanité, doit correspondre à ses attentes. Le défaut d’anticipation des pouvoirs publics pour former des médecins et des soignants en nombre suffisant crée un manque de personnel. Les soignants sont ainsi privés du temps nécessaire pour établir et nourrir l’indispensable relation de confiance avec les patients.

Quand un soignant est soigné, quand la verticalité savante devient horizontalité inquiète, la compréhension de la situation est vécue et appréhendée de façon nouvelle ! Il arrive que ce soignant-soigné ait envie de partager par écrit cet étonnement.

 Généralement la personne hospitalisée est satisfaite des soins pratiqués, mais elle garde en mémoire les difficultés relationnelles parfois maladroites voire insuffisantes.

Le patient a dès lors plus tendance à prendre la plume pour décrire ses souffrances et les difficultés rencontrées, que pour dire ses satisfactions… J’en suis la preuve vivante moi qui n’ai pas écrit mon contentement d’avoir été si bien soigné »

Richard BOUSIGES 2023.

A PROPOS DE CET OUVRAGE ! Les fées en blanc

            L’hôpital, vu par les écrivains, le livre de Richard Bousiges, évoque la  vie hospitalière, mais arrêtons-nous, un instant, avec l’aide de trois écrivains cités dans cet ouvrage, sur ces femmes et ces hommes soignants et dévoués comme un « monde en blanc » auxquels nous devons respect et admiration.

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Grand Corps malade

« Ayant passé beaucoup de temps en milieu hospitalier, et je peux vous assurer de mon grand respect et de mon éternel gratitude envers le personnel soignant. Ce sont des métiers, nobles, altruistes, difficiles et pourtant sous-payés. Je me suis bien entendu avec la grande majorité de toutes celles et ceux que jai rencontré »

Alors jai découvert de lintérieur, un monde parallèle,

Un monde où les gens te regardent avec gêne ou avec compassion,

Un monde où être autonome devient un objectif irréel,

Un monde qui existait sans que jy fasse vraiment attention.

Cest peut-être un monde fait de décence, de silence, de résistance,

un équilibre fragile, un oiseau dans lorage,

une frontière  étroite, entre souffrance et espérance,

ouvre un peu les yeux, c’est un monde courage

SLAM

Grand Corps Malade : Patients, Don Quichotte éditeur 2012 p : 9-10-49

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Léon Werth

« Lorsque la souffrance plus aiguë, contracta davantage mon visage, je saisis cette main. Et quand je souffrais plus, je la serrais davantage. Il faut avoir 39° de fièvre et souffrir dans son corps, pour sentir véritablement le secours dune main de femme inconnue. »

 « Jattends avec cette curiosité que chaque nuit me révèle de nouveaux pouvoirs dattente. L’attente dune maîtresse qui ne vient pas est un sentiment grossier dont nimporte quel brute, dont nimporte quel écrivain même est capable. Mais lattente de cette inconnue de cette personne neuve, dont je ne sais rien que son nom et qui se cachera dans le blanc costume invariable qui la mêle à la chambre blanche ! »

 « Elle me regarde dun regard que la bonté seule, assure et raffermit dun regard sans reproche »

 « Elle déplace, tapote et dispose en gradins mes oreillers. Puis elle maide à m’étendre et, de ses deux mains, ouvertes et rapprochées, elle saisit ma tête, lourde sur ma nuque raidie, et comme un objet fragile et précieux, l’a pose sur les oreillers. »

« Tout ce que je pourrais lui demander : déplacer mon oreiller, changer la place de la lampe électrique, mapporter de la citronnade, me faire une piqûre de morphine, elle y mettrait une si minutieuse attention, une telle hâte, et un si simple consentement, qu’elle aurait lair de sexcuser de ny avoir pas delle-même songé. Elle est bien la fée, la fée qui exauce les vœux du malade. »

Léon Werth : La blanche maison, Viviane Hamy éditeur 2020 p 92-111-113

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René de Ceccatti

« Observer nest pas se détacher. Comprendre nest pas avoir tout compris. Connaître une maladie nest pas avoir fait le tour dun malade. Une plainte nest pas pour elle un caprice. Un adulte qui ne peut pas quitter son lit nest pas un enfant. La vie est ailleurs, mais la vie est aussi ici. Sourire nest pas sapitoyer. Et compatir nest pas mépriser. Écouter nest pas perdre son temps. Soigner un malade, cest rencontrer un être humain. Quand elle est entrée dans la chambre, elle découvre un inconnu chez lui. Elle napprend à le connaître que s’il accepte de la connaître. Elle reste elle-même et il reste lui-même. Un dialogue ne commence pas comme un combat. Venir en aide nest pas assister un incapable. Un savoir-faire nest pas constitué d’évidence. Son expérience nest pas un pouvoir accumulé sur la faiblesse des autres. Elle a dans son regard encore toutes les souffrances quelle a vues, mais la répétition ne l’a pas rendue indifférente. Côtoyer la mort ne lui a pas appris à lui céder le passage. La voir venir à grands pas nest pas lui préparer le terrain. Les mourants sont encore de ce monde et le monde s’il se réduit à lhôpital en cet instant na pas toujours été prisonnier de ces quatre murs »

« Si elle parvient à établir un contact spontané et profond avec le patient, ce n’est pas seulement parce qu’elle a décidé, par éthique médicale et professionnelle, qu’un malade est un malade et que jamais une maladie ne doit être considérée comme une faute »

René de Ceccatti  l’accompagnement, Folio éditeur 2016 p 82-83

Trois auteurs qui ont vécus ce monde en blanc qu’ils ne voulaient pas connaître, plein de gratitude enfantine, une ode aux femmes de ce monde hospitalier qu’ils redoutent et admirent.

L’Hôpital vu par les Écrivains de Richard Bousiges / Le Huchet d’or Éditions, 2015 – 86 pages, 10 euros

Agenda: L’auteur Richard Bousiges présentera son livre le vendredi 15 septembre au CHR d’Orléans, lors des Journées Européennes du Patrimoine. (Salle de conférence Jacques Guillemeau à 14h30). A l’issue de cette communication, l’auteur dédicacera son livre à la boutique APHO.

Propos recueillis et relatés par le Docteur Denis DAUPHIN, Vice-Président de l’APHO